Les couleurs du passé
J’arrive à Johannesburg, ni en terre inconnue ni sans être attendue ! Paddi et James les vieux amis, de ceux qui ne sont jamais perdus de vue, sont là. Appuyés sur la barrière de métal, ronde et lisse du hall. Entourés d’une foule bigarrée et bruyante. Plusieurs langues parlées, des cris, un peu de bousculade et beaucoup de bras levés autour de nous. Embrassades, sautillades et quelques larmes.
Quel changement en 25 ans ! Ce hall était alors immense et vide, brillant et poli, calme, presque silencieux.
Un père qui retrouvait les siens m’avait surprise, il embrassait sur la bouche tous les membres de sa famille réunis là, endimanchés, en rang, sages et droits !
Un grand gaillard moustachu, en short beige et hautes chaussettes blanches indiquait cérémonieusement à chacun la sortie vers une baie vitrée ouverte sur une pelouse jaunie par l’hiver.
On était en juin 1989 et je découvrais l’Afrique par le Sud au lever du soleil. Une Afrique blanche, rigide et tendue.
Je n’avais pas pu voir le regard du premier visage africain rencontré. Un homme courbé, en salopette de travail, un balai à la main, les yeux accrochés au sol dans un coin du hall.
L’aéroport portait le nom de Jan Smuts et les avions avaient le fuselage tracé de bleu et orange. Les couleurs du passé…
© Carnet de voyage de Paskal Chelet-Roux à découvrir dans Bouts du monde n°24
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