Un ciel limpide, une lumière translucide. Je flâne le long du fleuve. Ses eaux rapides bleuies par le froid tournoient et se jettent contre les pierres qui parsèment son cours. L’air est glacé. Un rayon argenté inonde le paysage. Le fleuve étincelle. Un sentiment d’euphorie m’envahit. Les rives sont quasi désertes excepté ces femmes au loin venues laver leur linge. Les couleurs chatoyantes de leurs vêtements tachètent l’horizon de vert et de fuchsia. Que l’eau doit être froide ! Plus loin sur les berges se dressent des arbres couleur de feu. Le cuivre de leurs feuilles contraste avec le reste du paysage qui semble saisi par le froid. Dans quelques semaines ils se dépouilleront de leur parure flamboyante. L’automne cèdera lentement sa place à l’hiver. J’observe le fleuve en silence. J’ai cette impression insensée qu’un lien secret nous unit lui et moi. Un lien irrationnel. Je l’ai fait mien, et une partie de moi s’est laissée engloutir par ses flots. Je l’ai tant suivi des doigts sur la carte du Pakistan, j’ai tant détaillé ses courbes et ses détours, que le voir courir là, sous mes yeux, m’émeut et m’enchante.
L’Indus ! Ce fleuve mythique qui relie les hauts sommets du Gilgit-Baltitstan, au désert du Sindh, qui a vu s’élever puis s’effondrer des empires, et des civilisations, qui draine dans ses eaux les histoires que le Nord désire chuchoter au Sud. Source de vie pour les diverses populations qui se sont succédé sur ses rives, source d’inspiration pour les poètes, d’éveil pour les sages, de vénération pour les mystiques, source d’espoir pour les paysans, de tracas pour les différents envahisseurs qui se sont frottés à ses eaux, il sillonne le Pakistan de tout son long, variant au fil des époques et des saisons sa course et son flux.
L’Indus ! Je m’étais mis en tête de le photographier et de partir à la redécouverte du Pakistan en le prenant pour guide. Un voyage fragmenté qui me permettrait de traverser quatre provinces : le Gilgit Baltistan, le Khyber Pakhtunkhwa, le Pendjab et le Sindh. Sachant que le fleuve est long de 2 900 kilomètres, et que 93 % de ses eaux baignent le Pakistan, j’avais de quoi faire !
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