Ballade irlandaise
– EXTRAIT –
Au départ, quelques morceaux de musique traditionnelle irlandaise aux noms de lieux évocateurs : Bere Island, Trip to Nenagh, Spike Island lasses, Trip to Fanore… Puis l’envie d’aller voir sur place pour découvrir à quoi ressemblent ces îles, ces villages, ces baies qui ont pu susciter l’écriture d’une chanson ou la composition d’un morceau. C’est ainsi que d’un morceau à l’autre, s’est mis en place un premier itinéraire : de la ville de Tipperary jusqu’au nord du Clare en passant par les bords lumineux du Lough Derg, puis de la baie de Dingle à celle de Bantry pour arriver au sud de Cork, l’aventure a commencé. (…)
Première étape : Tulla (Tulach, « colline »). Tulla est, au premier abord, un village comme nombre de ceux que l’on trouve en Irlande. Mais bien vite, il devient une peinture, un tableau fauve, balade mouvementée en compagnie de Vlaminck et Marquet. J’ignore si cela vient du choix de couleur des maisons, de la lumière ce jour-là, de la météo à l’humeur changeante et capricieuse, mais le résultant est édifiant : à mesure que s’assombrit le ciel, venteux et colérique, tous les verts de Tulla se mettent à éclater. Vert véronèse des façades, vert électrique du rideau de l’épicerie, de l’herbe rase, vert bouteille de la porte d’entrée du pub, tous se mettent à vibrer devant la noirceur des nuages en colère. Le ciel fait luire les toits d’encre de ses excès d’eau et tous les gris de Tulla deviennent argentés. Nous nous retrouvons au milieu de tout cela, spectateurs trempés, mais étonnés et ravis d’être dans le tableau. (…)
Nous arrivons à Cobh, port de la ville de Cork, par un soleil tellement radieux qu’il se donne presque des airs d’avoir toujours été là, s’indignant même d’avoir été tant attendu. Cobh, dernière étape du Titanic, Cobh et ses lampadaires dont l’axe penché et la tête de travers, donnent l’impression de sortir directement du pub, Cobh et ses corneilles qui picorent sauvagement les fils électriques pourtant protégés par d’énormes bandages en plastique.
La suite du carnet de voyage d’Armelle Bourgeault est à lire dans Numéro 18.
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