Carnet de voyage de Claire & Reno Marca - Dans le sillage des dhows
Carnet de voyage - Émirats arabes unis

Dans le sillage des dhows

 C’est par hasard que Claire & Reno Marca croisent la route d’un dhow au large de l’île de Socotra. Intrigués par l’histoire de ces navires en bois et de leurs marins, ils décident de suivre leur route le long des côtes de l’Arabie jusqu’en Inde où ils seraient construits. Après plus de deux mois de voyage, ils arrivent à Sur, dernier fief de la construction de bateaux traditionnels au sultanat d’Oman.

– EXTRAIT –

Abdulazag s’apprête à partir vers la Somalie qui est, avec l’Iran, la destination de la plupart des bateaux de la Creek : ce n’est donc pas avec lui que nous voyagerons, hélas – sa compagnie aurait été agréable. Les boutres en route vers l’Inde se trouvent au port de Sharjah. Il nous suggère de nous y rendre bien qu’il juge notre projet d’embarquer très incertain : « Too much problems : custom, pirates… » Il a du mal à comprendre ce qui nous attire vers ces boutres : « Ils n’intéressent personne ! » Comment lui expliquer qu’ils nous insufflent des envies d’aventures ? Que ces dhows, dans un monde régi par l’empressement et l’excès, symbolisent à nos yeux une forme de résistance. Et que leurs marins nous apparaissent comme des anonymes dont on méconnaît la bravoure.

Un Émirati – ils sont rares en ces lieux où abonde la main-d’œuvre émigrée – nous interpelle, plus anglophone : « Dhows for India ? Not here. Go to Hamriya port, Dubaï ! » Nous ne sommes encore pas au bon endroit. Notre espoir depuis deux mois est comme une chèvre sur le djebel : un jour il galope vers une crête puis, le suivant, descend dans une combe.

Une longue course en taxi nous emmène le lendemain vers le port voisin de Sharjah, principale cité de l’Émirat du même nom. Apparaissent des dizaines de dhows à quai dans un bassin bordé de plusieurs belles mosquées et de souks. Certains sont tellement vétustes qu’il faudrait être un nostalgique de l’Antiquité pour s’embarquer sur l’un d’eux… Sur une petite abra pétaradante, nous gagnons l’autre rive et la zone industrielle du port, dans un épais nuage de fumée pour débarquer parmi un fouillis de marchandises jetées en vrac, sur des quais recouverts d’une poussière noire – sortie des innombrables sacs de charbon arrivés de Somalie. Les regards se figent à notre arrivée avec une curiosité amusée.

Nous trouvons avec peine un homme parlant un peu d’anglais.« Les dhows ici vont vers l’Iran, ou parfois au Yémen. » Craignant d’avoir mal compris, nous en interrogeons plusieurs, mais tous confirment ces informations. De même, dans la gargote proche, où un cuisinier suant au-dessus de ses fourneaux sert aux manœuvres du port des currys aussi épicés que ceux de leur terre natale. Étanchant notre soif sous la chaleur implacable, nous tâchons de rassembler nos esprits où les données errent comme des satellites égarés. Un Émirati – ils sont rares en ces lieux où abonde la main-d’œuvre émigrée – nous interpelle, plus anglophone : « Dhows for India ? Not here. Go to Hamriya port, Dubaï ! » Nous ne sommes encore pas au bon endroit. Notre espoir depuis deux mois est comme une chèvre sur le djebel : un jour il galope vers une crête puis, le suivant, descend dans une combe.

Carnet de voyage de Claire & Reno Marca à découvrir dans Numéro 29

à découvrir aussi

carnet de voyage en mer

Sortie de secours

Le cargo est entré dans la tête de Marianne Rötig à l’occasion d’un voyage entre Le Havre et Malte il y a trois ans. Il s’y est depuis solidement amarré. Et il lui a donné une bonne raison de prendre le large. – EXTRAIT – Je ne me souviens pas comment on fait pour partir,…

deux mer - voyage

Deux océans

Un océan bleu, vide. Puis un autre surpeuplé, vert. Eve Lagrange a traversé l’Atlantique à bord du voilier de Philippe, avant de dresser son hamac dans la forêt amazonienne. Avec, au fond du cœur, un dilemme qui n’a pas fini de la faire hésiter entre deux chemins : fuir la foule, ou bien s’y plonger…