Initiation sur les pistes rouges
– EXTRAIT –
J’en rêvais depuis si longtemps, ça ne pouvait être que l’Afrique. L’Asie, insidieuse et tenace, n’a pas attendu longtemps derrière pour me prendre dans sa toile, mais pour le présent, c’était le continent noir qui m’avait jeté un vieux sort. Y dénicher une destination, un argument de voyage, ne s’est pas fait tout seul, mais le système des chantiers d’entraide internationale m’a paru offrir un bon prétexte à choisir une destination plutôt qu’une autre : j’irais au Togo planter des arbres.
J’avais tout juste 20 ans, je n’avais jamais quitté l’Europe, et mon expérience en termes de voyage en solo – émancipation tardive – se limitait à une dizaine de jours à vélo dans le Luberon. Les vacances en famille s’étaient toujours limitées à ce qui pouvait se rejoindre en voiture depuis la Normandie ; on peut le dire, j’étais relativement vierge. Mais en parfaite confiance, mon aimantation pour l’Afrique me donnait des ailes, comme un sentiment d’aller voir une très vieille tante trop longtemps oubliée, mais indubitablement de la famille.
J’avais entendu parler de cette seconde où, en sortant de l’avion, une torride bouffée d’air humide chargée d’une odeur nouvelle et ensorcelante vient vous envelopper pour ne plus vous quitter. Grand sourire intérieur à me faire attraper comme prévu, la sensation m’a aussitôt plu.
Je ne me trompais pas, et elle ne manquait pas de charisme, la vieille tante ; elle m’a subjugué. À quoi m’attendais-je ? J’avais entendu parler de cette seconde où, en sortant de l’avion, une torride bouffée d’air humide chargée d’une odeur nouvelle et ensorcelante vient vous envelopper pour ne plus vous quitter. Grand sourire intérieur à me faire attraper comme prévu, la sensation m’a aussitôt plu. En revanche, mon avion atterrissait à Lomé au beau milieu de la nuit. Pas d’autre choix que de différer au lendemain mes premières impressions, le noir régnait en maître dans ce pays qui respectait la nuit en ne cherchant pas à tout en éclairer. Je m’apprêtais à chercher dans l’aéroport un banc où passer la nuit, mais quelqu’un m’attendait, sans doute n’était-ce pas plus mal… Une autre Française étant arrivée dans l’après-midi pour participer au même chantier d’entraide que moi, nous partirions ensemble le lendemain. Pour l’heure, la voiture circulait dans une ville étonnamment obscure et vide, seulement ponctuée de barrages armés auxquels il fallait rendre des comptes ; nous finîmes par arriver, après avoir quitté le goudron, dans un quartier périphérique aux ruelles complètement défoncées. On me présenta Laura, en même temps que le confort spartiate de ce qu’il convenait d’appeler une chambre, et le sommeil se chargea du reste.
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