La montagne aux joues percées
Xining, capitale de province, tient plus qu’elle ne promet. Premier abord : c’est une ville normalement hideuse, à la chinoise, juste aimable pour son ciel bleu ; le ciel bleu, en Chine, ayant tendance à devenir une pièce de musée, nous n’allons pas bouder ce trésor d’azur.
Mais on devine que les slogans officiels de propagande « Cool Xining » ne sont pas que des formules creuses, à moins que je les aie confondus avec des publicités pour la bière locale, auquel cas ils sont encore plus appropriés. Les habitants de la ville (et nous avons essayé les trois sortes, Hans, Musulmans et Tibétains) se montrent avenants et serviables. Un étudiant en théologie coranique s’improvise notre guide, une Chinoise entreprend Patrick, enfin une jeune étudiante tibétaine hèle pour nous un taxi qui nous emmène dans un lieu qu’elle a choisi à notre place ! Xining est hospitalière, multiethnique et imprévisible.
Patrick est aussitôt séduit par cette Chine musulmane aux foulards gais. Enfin, dit-il, des foulards qui exaltent la féminité au lieu de la répudier ! C’est un islam de doux barbus, de vieillards à binocles qui prennent leur nonchalance au sérieux, de jeunes mères en voiles à dentelles et baskets, d’yeux bridés sous des calottes blanches ou des chapeaux de paille qui ombrent les parties d’échecs ; parfois l’on voit passer de jolies jambes pâles sous une robe rose, et l’on se regarde d’un air entendu.
Je ne cherche pas de présence spirituelle, juste la paix de vivre, bien mise à mal par les derniers mois pékinois. Et je commence à la retrouver avec ces deux vieux copains que sont Patrick et mon pinceau
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