Carnet de voyage - Inde

Le jour où j’ai été figurant à Bollywood

Cela s’appelle découvrir l’envers de décor. À Mumbai, Nicolas Breton a découvert ce qu’il était venu chercher : les pittoresques plateaux de cinéma de Bollywood.

– EXTRAIT –

Bollywood est la plus grosse industrie cinématographique mondiale, avec plus de trois nouveaux films achevés chaque jour et des milliards de spectateurs. En Inde, au Pakistan, en Afrique du Nord, au Moyen-Orient… ce n’est pas Hollywood mais Bollywood que l’on regarde. Il y a les films traditionnels avec des chants, des danses, des drames familiaux et amoureux, mais Bollywood, c’est aussi des films d’action, des films engagés, des clips vidéo, des séries télévisées et des produits dérivés. Il paraît que leurs directeurs truffent leurs productions d’acteurs et de figurants blancs pour jouer des scènes censées se passer en Occident ou donner à leurs histoires une couleur internationale… Est-il possible, même sans expérience, de se retrouver dans un film Bollywood ? Je veux le vérifier par moi-même. Excité par cette possibilité un peu folle, c’est avec ce seul objectif en tête que je débarque à Mumbai : être figurant, voire acteur dans un film de Bollywood.

Me faire aborder dans la rue

Étranger, perdu dans les rues de Mumbai, je ne connais personne et ne comprends rien aux codes de cet étrange pays. Par où commencer ? On m’a parlé du quartier Colaba où l’on peut se faire approcher dans la rue par un agent de casting. Je m’installe dans un petit hôtel du coin et erre dans les rues. Dès le deuxième jour, un Indien en costume bien taillé, avec une chemise rose, au regard nonchalant et au sourire charmeur, s’approche de moi.

« Hello my friend. What is your little good name? (Bonjour mon ami. Quel est ton beau petit nom ?) – Heu… Nicolas. Et vous ?

– Ça te dit de jouer dans une série demain ?

– Oui, pourquoi pas. De quoi s’agit-il ?

– Tu joueras le rôle d’un homme qui se sort d’un accident de voiture. Peut-être que tu auras une ou deux répliques à jouer. Tu seras payé 500 roupies et ça durera une journée, me dit-il en me donnant sa carte de visite.

– OK. Je suis partant. »

Je m’endors, stressé par l’inconnu mais en rêvant aux étoiles du cinéma indien.

Mon premier job : acteur pour une série télé

Le lendemain matin à 8 heures, un rickshaw passe me prendre à l’hôtel puis récupère deux autres Occidentaux : Rasmus, un Suédois, et Fredo, un Français. Nous sommes accompagnés par Cashu qui va s’occuper de nous toute la journée. Il nous amène à la gare Victoria où nous prenons le train. Des centaines de bidonvilles défilent le long des voies laissant un désagréable sentiment de culpabilité et de tristesse. Nous descendons dans une banlieue lugubre et marchons au milieu d’un bidonville. Au loin, nous apercevons quatre grands murs délabrés surmontés de barbelés.

« Nous sommes arrivés », nous annonce Cashu avec un grand sourire.

C’est vraiment un studio de cinéma ça ? Ça ressemble plutôt à une prison. Si ça se trouve, c’est un guet-apens.  Nous entrons. Ouf, il s’agit bien d’un studio de cinéma. Ici tout est faux, de la station d’essence en passant par l’épicerie, nous voici dans une petite ville fictive. Le réalisateur nous salue. Lunettes de soleil sur le nez, le torse bombé et l’air hautain, il semble nous mépriser.

« Est-ce que vous avez de l’expérience ? nous demande-t-il.

– Oui un peu ; j’ai fait du théâtre en France.

– Dans ce cas, vous allez sûrement avoir un petit rôle à jouer.

– OK. Mais heu… Est-ce que vous pouvez nous expliquer la série et nous montrer le script de l’épisode. Et quels personnages nous allons devoir jouer ?

– No problem my friend »

On attend des heures durant. Je redemande le script et on me répond : « No problem my friend. » Une heure plus tard, troisième tentative : « No problem my friend». Il commence déjà à m’énerver celui-là.

Carnet de voyage de Nicolas Breton à découvrir dans Bouts du monde 54

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