Eric Tournaire - Tour du monde dans un vélo d'appartement - Bouts du monde
Carnet de voyage - Histoire de voyageur

Le tour du monde en vélo d’appartement

Petit plateau, grand pignon. Du jour au lendemain,Éric Tournaire a changé de rythme. La faute d’une foutue maladie qui l’a condamné à faire, chaque jour, son quota horaire de vélo d’appartement, histoire de faire dérailler sa progression. Mais on n’assigne pas ainsi un voyageur à l’immobilité.

– EXTRAIT –

Toute cette aventure remonte à loin ! Pour en reprendre la chronologie exacte, il me faut remonter jusqu’en novembre 2012, pendant le Salon du Carnet de Voyage de Clermont-Ferrand.

Le Passeport pour la Touchkanie, chroniques de voyage farfelues et imaginaires concoctées avec Fabien Palmari, venait d’être publié par les éditions Elytis. Pour battre le fer pendant qu’il était encore chaud, je propose à l’éditeur une autre imbécillité potentielle, par exemple le tour du monde sur un vélo d’appartement, qui éveille son attention.

Fatalitas ! Deux mois plus tard, je suis diagnostiqué atteint de la maladie de Parkinson,,,

C’est une grande claque, physique et émotionnelle,,,

Kiné et neurologue m’annoncent que, pour tenter de ralentir quelque peu la dégénérescence neurologique et musculaire, je dois impérativement faire… du vélo d’appartement ! L’idéal étant de le pratiquer au moins deux heures par jour. À cette époque, la maladie progressait à grandes enjambées.

Je présentais déjà 25 % des symptômes. Rester debout immobile m’était impossible, je me dandinais et m’agitais dans tous les sens, cherchant en vain un fragile équilibre. J’avais perdu le balancement des bras pendant la marche, et ma jambe droite se traînait ou partait décrocher la lune à chaque enjambée. Je titubais et me recroquevillais sur moi-même. Mes nuits agitées de tremblements n’étaient qu’une succession de veilles déprimées… Physiquement, je devenais une loque, un pauvre débris torturé par d’affreuses crampes neurologiques, dont rien ne pouvait atténuer les douleurs.

Je pédalais en bouquinant, ou en regardant des films, et les symptômes, petit à petit, s’atténuaient doucement. Mais il n’y a rien de plus chiant que de pédaler sur place, surtout pour un voyageur !

Alors, je me suis cramponné aux pédales du vélo d’appartement que possédait mon épouse. Une séance de cinq minutes paraissait durer une éternité. J’ai persévéré, actionné la machine dès que la maladie me laissait du répit, additionnant les minutes, puis les quarts d’heure, les demi-heures, jusqu’à parvenir, exploit ! aux deux heures quotidiennes.

Je pédalais en bouquinant, ou en regardant des films, et les symptômes, petit à petit, s’atténuaient doucement. Mais il n’y a rien de plus chiant que de pédaler sur place, surtout pour un voyageur ! Je me suis alors demandé jusqu’où me conduiraient ces cent vingt minutes quotidiennes, si je les reportais sur une carte ? Petit calcul : en un an, j’aurais virtuellement parcouru environ neuf mille kilomètres, ce qui me faisait atteindre Tokyo ! Waow ! Pas mal ! J’ai recontacté mon éditeur.

Carnet de voyage d’Eric Tournaire à découvrir dans Bouts du monde 49

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