Pakistan Bouts du monde 40
Carnet de voyage - Pakistan

Les liens invisibles

Les torches pleines de vigueur éclairent la nuit. Ce soir, tout le monde est réuni. Le serpent de feu descend de la montagne et les villageois, porteurs de souvenirs et d’espoirs, se dirigent vers Balanguru, au bout de la vallée de Rumbur.

Un très grand feu attend tous les habitants de la vallée. Les visages et les esprits s’éclairent, ceux des vivants et ceux des morts invités à la fête, nourris depuis des jours par des paniers de fruits, de pains aux noix et de biscuits. Le silence se fait quand ils approchent.

Écoutez, ils sont forcément parmi nous, c’est le moment de laisser revenir l’instinct, l’âme d’enfant qui s’émerveille : la beauté du monde réside dans l’invisible. C’est la Tanjah, la fin de la fête du Chaumos, qui célèbre l’arrivée du nouveau cycle de la vie et de la nature. Demain, le jour sera plus long et la terre renaîtra alors que la neige n’est pas encore arrivée.

Balumain sur son cheval aux sabots de feu est revenu et répond à la promesse de récoltes fructueuses et de mariages chanceux : le Chaumos est la plus grande célébration chez les Kalash. Elle est le socle sur lequel l’identité kalash, ébranlée par la frénésie du monde, s’appuie pour ne pas vaciller. Les quelques jeunes femmes, timides, sont entraînées par les mères et femmes plus âgées. Elles chantent fort. Le pas est lent, puis s’accélère.

Leurs coiffes et robes noires tournoient sur ellesmêmes pendant qu’elles lèvent les mains vers le ciel. Rayonnantes et en accord avec les chants, elles transmettent ainsi leur savoir et ce que seuls les paroles et le corps peuvent exprimer. Ce soir, on me pousse à fouler la piste, à tourner autour du feu. Ce serait un signe de communion, mais j’ai peur d’être ridicule et pour si peu j’enclenche une grande réflexion, je bloque ! Pourquoi ce sentiment ? Je reste prisonnière de mes barrières, je n’arrive pas à lâcher prise. Je recule et me réfugie auprès de Zahir Gul, la femme de Wazir.

(…)

Carnet de voyage de Barbara Delière à découvrir dans Numéro 21

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