L’ombre portée des Dogons
– EXTRAIT –
Il est 5 heures. Le soleil se lève à peine. Un vent froid souffle sur Bandiagara. C’est l’harmattan qui finit sa saison. Le village dort encore, seuls les chiens et les chèvres offrent le concert comme s’ils communiquaient d’un bloc à l’autre du quartier.
C’est parti pour une longue marche en Pays Dogon. Quelques jours entièrement coupés du monde car là-bas, ni courant, ni réseau de téléphone portable, ni eau potable. Ce genre de séjour où l’on se retrouve, quelque part, comme remis à neuf. Et remis à sa place… Je pars avec Idrissa, un jeune Malien de Mopti qui m’a été présenté par des amis.
Le légendaire Pays Dogon s’étend sur un plateau doucement incliné du sud-est vers le nord-ouest, vers la plaine du Niger et les confins du Burkina Faso. La partie élevée de cette inclinaison forme une falaise de 80 kilomètres de long, et haute de parfois 200 mètres. Tout au long de cette falaise, les villages sont accrochés, éparpillés et presque dissimulés dans la roche. Les Dogons vivent dans des maisons de boue renforcée de paille, de pain de baobab et de beurre de karité pour les rendre plus solides et imperméables à l’eau. Elles ressemblant à des châteaux de sable géants. La population de la tribu est estimée à environ 10 000 individus, principalement des fermiers et des prêtres, leurs guides philosophiques et religieux. (…)
A Irelli, on se retrouve face à la toguna, la case à palabres, un lieu propre à chaque village où se retrouvent quotidiennement les hommes et tout spécialement les sages. C’est le lieu de transmission de la tradition, l’endroit des débats et le « parlement local ». Deux sages y discutent paisiblement. Je leur tends une poignée de noix de cola (…)
Les Vieux nous invitent à nous asseoir avec eux. C’est un honneur que de se retrouver dans la case à palabres du village. Les femmes en sont catégoriquement exclues. Et nous voilà sous ce lourd toit de paille, posé sur l’ultime gros rocher du village avec une hauteur à peine suffisante pour s’asseoir convenablement. On domine toute la vallée. Idrissa, qui parle un peu leur dialecte, nous permet de discuter tous ensemble. Le vieux est tellement beau. Il est d’une force et d’une douceur à la fois… Vraiment impressionnant. Ses deux arrières petits fils nous rejoignent et se blottissent contre lui. Il a 79 ans.
Carnet de voyage de Pascal Mannaerts à découvrir dans Numéro 8.
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