Mers du Sud
– EXTRAIT –
Le Rio de la Plata. Nous partons comme un bâtiment de commerce, dans l’anonymat absolu. 19 janvier 2010. Le Rio de la Plata, encore appelé Mar Dulce par le navigateur espagnol Juan Diaz de Solis étonné en 1516 de trouver en pleine mer de l’eau douce, est un gigantesque delta qui n’en finit pas de s’étendre vers le large. De 46 kilomètres de large au niveau de l’intersection des Mageldeux fleuves qui le créent (l’Uruguay et le Parana), il atteint les 220 kilomètres de large quand il se confond avec l’océan Atlantique.
Deux pilotes argentins nous accompagnent dans ce chenal balisé dont il ne faut pas s’éloigner. Nous croisons d’énormes porte-conteneurs et cargos qui se dirigent vers Buenos Aires. Dans l’après-midi, la météo se détériore rapidement. Les vents montent en puissance et remuent une mer de couleur inhabituelle, café au lait, avec des nuages d’écume. Les eaux saumâtres du Rio, mélange d’eaux salée et douce, ressemblent à un véritable cappuccino. Les sorties extérieures sont interdites en début d’après-midi. Les vents s’époumonent et atteignent les soixante nœuds.
Par instants, des hordes d’embruns chevauchent la plage avant et la transforment en linceul blanc. Le bateau tient la route avec merveille. Rien ne bouge dans les coursives et l’on sent simplement de temps à autre un léger mouvement de tango qui ne surprend guère. Les marins et quelques passagers se sont réfugiés en passerelle, tentant vainement de passer inaperçus dans les recoins de ce lieu ouvert sur l’extérieur. Le pacha est présent, observant la route de son bateau au travers de cet interminable chenal. Route au 100. Première journée de mer entre Buenos Aires et Ushuaia.
Carnet de voyage de Luc-Christophe Guillerm à découvrir dans Numéro 37
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