Mission farfelue dans le Rub al-Khali
-EXTRAIT-
Après on service militaire puis un long et salvateur voyage en Amérique du Sud, j’arrive en France le 11 septembre 1973, le jour du coup d’État de Pinochet, pour commencer mes études, d’abord en communication puis ensuite en arts plastiques, ethnologie, architecture. Alors que je travaillais pour la revue Recherche et Architecture, je tombai sur un article de Jean-Pierre Heim de retour du Yémen. […]
« Comment me suis-je mis en tête, il y a trente ans, de retrouver la capitale de la reine de Saba ? »
Pendant des mois, je me suis préparé méthodiquement en bibliothèque, j’ai rencontré des spécialistes, j’ai repris l’apprentissage de l’arabe. Je suis parti pendant cinq mois, de l’Égypte à la Tanzanie. Mon objectif principal était l’Érythrée, le Yémen, Djibouti, l’Éthiopie. Il s’agissait de retrouver mes racines, de vivre sur les pas de Monfreid – rencontré à Paris l’année précédente -, Kessel, Gary, Rimbaud, Burton, Speke et Malraux. Une très longue histoire commence alors en 1974 et se poursuit aujourd’hui cinquante ans après… L’aventure d’André Malraux m’amusa beaucoup. Son aventure rocambolesque réveilla les archéologues et les institutions qui lancèrent grâce à lui des explorations terrestres.
André Malraux avait planté le décor : « Cette terre de légende appelle les farfelus ». « Comment me suis-je mis en tête, il y a trente ans, de retrouver la capitale de la reine de Saba ? », racontait le romancier dans ses Antimémoires, en 1965. Fallait-il que le jeune lauréat du prix Goncourt (La Condition humaine), alors âgé de 33 ans, se lance dans un coup d’éclat, comme s’il s’agissait de faire oublier la déplorable aventure au Cambodge ? Le personnage très singulier était déjà connu pour ses frasques et certaines aventures pleines de paradoxes. D’abord, il réussit à se faire réformer du service militaire en raison de ses tics et de maux imaginaires. Le farfelu, c’est lui, et certainement pas ceux qui l’ont inspiré : Lawrence d’Arabie, Arthur Rimbaud ou l’explorateur Arnaud, découvreur en 1841 du site archéologique de Maareb, l’antique capitale du royaume de Saba perdue en bord du Rhub al-Khali.
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