Carnettiste : Joël Alessandra - train - Ethiopie - bouts du monde
Carnet de voyage - Éthiopie

Des rails tordus en Ethiopie

J’ai vécu presque deux ans à Djibouti, dans la Corne de l’Afrique dans les années 1990, sans avoir jamais emprunté son célèbre chemin de fer. Le Djibouto-éthiopien, qui reliait Djibouti à la capitale éthiopienne Addis-Abéba, empruntait un vieux tracé de caravanes en montant lentement vers les hauts plateaux. En 2008 finalement, je décidai de faire le trajet avant la fin inexorable de cet incroyable monument ferroviaire inauguré par les Français en 1917.

Je prends le train et m’installe en première classe. La seule différence avec la troisième ou les toits du train est le prix du billet. Les banquettes sont défoncées, les rideaux sales et déchirés, les ventilateurs mous du plafond muets à jamais… Mais l’atmosphère qui y règne est magique, on se croirait dans un film de Depardon avec cette langueur monotone des kilomètres de voie qui s’enchaînent au milieu du désert et qui bercent lentement…

Soudain la vraie vie. Je jette un œil en troisième classe, là des chants, des rires, des millions de couleurs chatoyantes, des ballots, des caisses énormes remplies de denrées… Le train est un véritable marché ambulant où bananes et volailles vivantes côtoient le khât, la drogue locale consommée par chacun.

Ce train n’est pas un moyen de transport comme les autres, le chemin de fer raccourcit les étapes entre les peuples : au fil des kilomètres, le farendj (étranger, ndlr) que je suis croise des Afars, des Somalis, Gadabourcis ou Issas, des Oromos, des Ethiopiens, des Erythréens, quelques Yéménites mais je rencontre aussi surtout Rimbaud, Conrad, Kessel et Henry de Monfreid. Ils ne me quitteront dès lors plus jamais.

© Carnet de voyage de Joël Alessandra à découvrir dans Bouts du monde n°24

Lien(s)
Le site de Joël Alessandra

à découvrir aussi

Carnet de voyage en Ukraine - Marco Carlone

Le tortillard des Carpates

par Marco Carlone

Avec son appareil photo, Marco Corlone s’est promené parmi les étals de légumes et de pièces détachées pour voitures disposés sur les rails. Il a acheté quelques concombres à l’ombre du train, réparé le moteur avec les machinistes et pris un café avec le directeur de la gare. Enfin, lorsque le dernier étal a fermé…

carnettiste : Karen Guillorel - transsiberien - Russie - bouts du monde

L’intimité du Transsibérien

par Karen Guillorel

Les genoux repliés sur une banquette du Transsibérien, Karen Guillorel observe par la fenêtre les forêts de bouleaux succéder aux villes de ciment. Sur son téléphone, elle pianote une lettre à son amie poète, Milady Renoir, et lui raconte les premiers jours du quotidien à bord du mythique train. – EXTRAIT – Chère Emmy, Je…