Robinsonnades dans l’océan Pacifique
– EXTRAIT –
29 juillet 2018, 8 h 20, Black Lion quitte la baie de l’Orphelinat à Nouméa pour sillonner les mers du monde… Nous avons attendu ce jour depuis le moment où nous avons remis pied à terre.
Deux ans, ce n’est pas si long ; pourtant ces deux ans nous ont paru interminables. Dans le tourbillon d’une affaire florissante nous avons failli nous perdre en nous déchirant. Tout est arrivé si vite ! Internet, les réseaux sociaux, les nouveaux produits ! Finalement, c’est ce qu’il nous fallait et nous l’avons certainement provoqué pour ne pas ruminer et penser à la vie que nous venions de quitter ! Cette vie de bohême et de voyage en famille qui nous faisait monter les larmes aux yeux dès la moindre évocation.
Est-ce une profonde détermination, des circonstances opportunes, un bon karma, ou les trois réunis, je ne saurais dire. N’empêche qu’en arrivant sur notre caillou dans le Pacifique, il ne nous a pas fallu plus de trois mois pour nous rendre compte que nous venions de trouver le business qui allait nous permettre de repartir…
Nous venons de terminer le carénage, toutes nos exigences sont maintenant réunies. Le reste des préparatifs est du fignolage qui peut se poursuivre en voyage mais nous sommes dans l’attente de notre nouvelle grand-voile. C’est elle qui va déterminer le jour J que nous estimons probablement à la fin du mois de juillet. À ce stade, l’impatience commence à nous titiller ; cependant, nous avons de quoi occuper nos ultimes journées sur le caillou calédonien. Nous pouvons sans précipitation continuer à accommoder notre cocon ! Tout y passe, check-up complet de l’outillage, des pièces de rechange, de la pharmacie de bord, du matériel de plongée et de pêche, sans oublier l’avitaillement.
Devant la passe d’Ouarai à 48 milles de Nouméa, sous un ciel bleu azur, notre jeune Lion Noir emplit ses poumons de la légère brise et pointe sa truffe vers l’océan iridescent. La houle langoureuse du large nous berce déjà, l’esquisse est dépassée, le voyage a bien commencé…
Les dates et les jours n’ont plus d’importance ! Le temps passe toujours aussi vite mais sans impératif, protocole ou rendez-vous, il se dilapide sans gaspillage. Seul compte le moment présent… Nos obligations reviennent à l’essentiel, dessaler notre eau pour pouvoir la boire, pêcher notre poisson pour le manger et suivre l’évolution de la météo pour naviguer dans de bonnes conditions. Nous retrouvons le bien-être de vivre au rythme des éléments et les plaisirs de la plaisance. Depuis notre appareillage, Black Lion s’est laissé emporter le plus souvent par son gennaker sous peu de vent. Dans ces circonstances idéales, Cyril s’est essayé à de multiples réglages, histoire de développer la complicité avec son fauve. Docile, il se laisse diriger sans résistance par la main de son capitaine qui lui a demandé de border la côte ouest du caillou. Sur 250 milles, la Nouvelle-Calédonie a défilé, exposant sur ses terres les stigmates des mines de nickel. Puis, nous avons atteint l’extrémité nord, calme, en état quasi vierge. Intenses instants ! Si la Grande Terre se termine là, par vingt degrés de latitude sud, c’est aussi et surtout le point du prélude de notre inconnu…
Carnet de voyage de Magalie et Cyril Jagot à découvrir dans Bouts du monde 52
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