Description
Les sommets de l’Himalaya
Mais que faisaient-ils là-haut ? « Parce qu’il est là ! » Vraiment ? Le bataillon d’alpinistes qui, au printemps, a fait la queue pour atteindre le sommet de l’Everest avaient-ils les mêmes motivations que George Mallory à qui on demandait sans cesse quelle folie avait pu s’emparer de son esprit pour s’engager dans une aussi dangereuse aventure ? Le doute est permis.
A voir l’embouteillage qui s’est formé au-delà du ressaut Hillary, on imagine volontiers que c’est parfois la vanité plus que l’amour de la montagne qui a guidé les pas de ces touristes des sommets, acheminés là au prix fort par des agences peu regardantes. La plupart ne sont pas alpinistes pour un sou. Sinon, ils seraient allés voir autour du Dhaulagiri, du Rakapushi, pour ressentir l’euphorie de la montagne. Mais ces sommets moins connus, ça ne vaut rien sur un cv. Au printemps, il y avait moins de monde sur le causse Méjean que dans la zone de la mort.
Quelle folie de voir notre époque transformer l’inaccessible en hotspot à la merci du tourisme de masse ! Dans les rues de Thamel à Katmandou, sans doute promet-on à des aventuriers fraîchement équipés de Goretex de vivre la même expérience que ceux qui ont consacré leur vie à la montagne.
« Emu aux larmes »
La montagne se mérite. Peut-on parcourir la Chadar comme si de rien était ? C’est par ce fleuve gelé que les habitants du Zanskar peuvent quitter leur vallée au plus fort de l’hiver quand les cols sont pris par la neige. S’y engager, comme l’avait fait Olivier Föllmi, n’est jamais anodin. Elle nécessite de monter des expéditions et de faire partager à ses guides les risques que l’on a choisi de prendre soi-même.
Le photographe Christian Frémin n’y est pas parti à la légère. Lui qui documente depuis des années le quotidien des vallées du Zanskar a été surpris de voir des groupes de touristes indiens marcher comme ils pouvaient sur la glace, après avoir vu le Taj Mahal et avant de découvrir les cités du Rajasthan. Jacques Ducoin et son fils David n’en avaient vu aucun quand ils avaient parcouru le fleuve gelé la première fois. Vingt-cinq années plus tard, ils ont retrouvé là les guides qui les avaient conduits à travers ces paysages époustouflants. Le temps, la distance et la différence de culture n’ont pas altéré la solide amitié qui s’est nouée entre eux. Ce sont les guides qui ont conduit si souvent en Himalaya Philippe Montillier, « touché au cœur » et « ému aux larmes » par la vie de ces hommes des chemins.
Le meilleur de la montagne semble se nicher sous ses sommets. Sur les chemins raides du Langtang, où Laurent Jeanneau a profité chaque soir de la chaleur de lodges. Le long de la route du Karakoram où MariBlanche Hannequin n’en finit plus de s’émerveiller. Au fil de l’Indus, fleuve mythique qu’a parcouru la photographe Oriane Zerah depuis sa source jusqu’à l’embouchure, embrassant le Pakistan du nord au sud. En compagnie de François Delclaux, un hydrologue en vadrouille au pays du yéti. Ou bien au pied du mont Kailash où Mathieu Gay a installé un télescope pour voir à quoi ressemblaient les étoiles là-bas.
Là-haut demeure aussi un danger de tous les instants. Sylvain Bazin, qui en connaît pourtant un rayon en trek et en haute montagne, a failli laisser sa vie à l’ombre du Kanchenjunga. Un récit poignant qui rappelle la nécessité de l’humilité face à ces géants.
William Mauxion