Du 18 au 20 novembre 2022, nous étions présents au 22e Rendez-vous du carnet de voyage de Clermont-Ferrand. Nous avons profité de cette occasion pour rencontrer des auteurs publiés dans la revue. Passionnée de dessin, elle a décidé de voyager pour raconter le monde à sa façon. Découvrez l’interview de Ségolène Girard.
D’où est née ta passion pour le dessin ?
J’ai commencé à dessiner quand j’avais six ans. Un jour, mon grand-père a pris l’image d’un zèbre et m’a montré comment le reproduire en me donnant des conseils. C’était tellement bien fait, tellement magique que je m’en souviens encore aujourd’hui. Voir les personnes dessiner, voir un monde ou un personnage naître d’une feuille blanche et d’un crayon, c’est ce qui a fait éclore ma passion pour le dessin.
Qu’est-ce qui t’a fait aimer le voyage ?
Il est inconcevable pour moi qu’on puisse ne pas aimer voyager. C’est la découverte, la vraie vie. C’est le fait de se jeter dans l’imprévu qui amène à percevoir la vie différemment, à être attentif, à communiquer avec des personnes qui n’ont pas la même culture. J’ai découvert récemment le voyage en solitaire. J’ai adoré le fait de me jeter seule dans l’inconnu et de me sentir libre.
Qu’aimes-tu le plus dans les rencontres ?
Ce sont souvent les habitants que l’on rencontre qui nous font découvrir leur pays. Ils ont envie de nous montrer à quel point c’est beau et ils nous emmènent dans des lieux que l’on n’aurait jamais pu découvrir seuls.
Peux-tu nous partager une rencontre qui t’a marqué durant un de tes voyages ?
Un soir, nous voulions manger dehors et avons été happés par un Japonais qui nous a très bien vendu son restaurant. C’était un lieu très touristique où nous nous sommes retrouvés dans une tour, coincés dans des petites cases. Il y avait des petites tables séparées et des barrières partout. On a complètement étouffé. En redescendant du restaurant, on a remarqué un lieu authentique rempli de fumée. On n’aurait jamais osé y entrer, mais nous sommes tombés sur un Japonais qui parlait un peu anglais et qui nous a attiré dedans. C’était un restaurant coréen où ils cuisinaient sous nos yeux. On a passé la soirée là-bas à boire du Soju, puis on a enchaîné avec une soirée Jazz. Grâce à ce Japonais, on a découvert des lieux à Tokyo qu’on n’aurait jamais découverts autrement. Il nous a sortis de la zone touristique pour nous amener dans sa vie. Grâce à lui, nous avons passé une soirée exceptionnelle.
Pourquoi avoir décidé de raconter tes voyages en dessin ?
J’adore dessiner, j’ai un travail à côté, mais j’ai décidé d’y consacrer du temps. Ça fait trois mois que je suis sur un projet dans lequel je passe mes journées à dessiner en écoutant de la musique. Le voyage est un magnifique prétexte pour faire du dessin. Ça me permet de pousser ma technique, de regarder ce qui se fait autour, de m’inspirer, etc. Si je ne prends pas le temps de le faire, je ne le ferai jamais. J’ai décidé que cette passion du dessin allait faire partie de ma vie et donc, il fallait que je me trouve une bonne raison de le faire.
Quel est ton processus pour dessiner ?
Je ne fais quasiment rien sur place. Sur place, je dessine, mais j’utilise le dessin pour rencontrer des gens. Je me pose quelque part, je sors mon carnet et je commence à dessiner. Tout de suite, des personnes vont venir me parler et ça me permet de nouer des liens. Mais, je ne vais jamais au bout de mon dessin, car il y a toujours une bonne raison pour arrêter.
Je préfère travailler après, c’est pour ça que je prends des photos et que j’écris pour me donner une orientation.
Tout ce que je dessine, je sais que cela va illustrer un texte existant, ce qui me permet de suivre un fil conducteur. Ensuite, je dessine en studio, au calme.
Dessiner d’après l’observation, c’est un exercice très intéressant, mais ce n’est pas ce que j’ai envie de mettre dans un livre. Je préfère qu’il y ait une interprétation.
Ici, il y a un dessin qui est une espèce de schéma technique des deux plaques tectoniques qui passent l’une au-dessus de l’autre et qui explique pourquoi il y a des séismes à Taïwan. Le paysage derrière, lui, montre la fracture. Le dessin, par rapport à la photo, apporte une explication.
C’est ça qui m’intéresse : ne pas reproduire forcément ce que je vois, mais en dire ce que je veux. Dans le dessin, on est libre.
Retrouvez le carnet de voyage “Lumières à Tokyo” de Ségolène Girard dans la revue Numéro 45