Du 18 au 20 novembre 2022, nous étions présents au 22e Rendez-vous du carnet de voyage de Clermont-Ferrand. Nous avons profité de cette occasion pour échanger avec des auteurs qui ont publié dans la revue. Écrivain, peintre et voyageur originaire de Bretagne, Simon a parcouru le monde à la découverte de paysages et de cultures inconnues. Durant son voyage, il a déposé ses bagages en Chine, où il est resté durant 4 ans. Découvrez son interview.
D’où est née ta passion pour le voyage ?
Cette passion est née allongé sur mon édredon. Mes premiers voyages étaient des voyages dans l’imaginaire, des voyages d’enfant qui lisait Jules Verne. Et puis, durant mon adolescence, j’ai pu effectuer un voyage merveilleux en Algérie qui m’a laissé un virus indécrottable : celui du voyage. Pour moi, voyager n’est pas lié au fait de partir loin, mais c’est le fait de se mettre dans une disponibilité totale. Une disponibilité intellectuelle et corporelle à l’autre, à l’ailleurs, aux paysages inconnus.
Quand as-tu commencé les carnets de voyage ?
L’acte de baptême a été mon voyage en Algérie. Depuis, j’ai cessé de voyager sans carnet de voyage. Depuis mes 12-13 ans, âge où j’ai commencé à écrire, j’ai toujours un stylo et une petite aquarelle. Je pense que si on me privait de mes mains, je ne voyagerais plus. Le monde est devenu mon atelier.
Selon toi, que contient un carnet de voyage ?
Pour faire un carnet de voyage, il est primordial d’avoir un regard authentique. Il faut prendre le temps pour rentrer dans le temps des autres. On doit sentir, dans un carnet, le rythme du voyage : la cadence de la marche, le moment où on fait du vélo, les moments où on n’a que deux minutes avant de prendre le bus, mais aussi les moments où on va s’installer trois semaines dans un lieu. Dans mes carnets, j’essaie de faire sentir ce rapport au temps et les différentes cadences que l’on peut avoir en tant que voyageur. Le carnet de voyage, c’est aussi un véritable dialogue entre plusieurs manières de dire : la photographie et le dessin, le dessin et la littérature ou encore le collage et l’écriture. Ce qui fonde un carnet de voyage, c’est cette pluridisciplinarité avec laquelle on va pouvoir utiliser plusieurs langages pour raconter une expérience.
Comment fais-tu pour réaliser tes carnets de voyage ?
J’essaie de changer de méthode à chaque carnet. Ce qui fait le continuum, c’est que j’aime m’installer deux ou trois heures tous les matins quelque part. Je vais m’installer dans une réalité et me laisser absorber par elle de manière plurisensorielle. Ce n’est pas simplement du visuel, c’est ce que je vais renifler, entendre et pouvoir toucher dans un paysage. Dès lors qu’il y a un début d’immersion, je vais commencer à dessiner. Je ne dessine jamais au crayon, j’attaque tout de suite à l’encre ou à l’aquarelle et de plus en plus au pinceau. À l’origine, je dessinais sur des carnets de dimension 10 × 15 centimètres. Aujourd’hui, je dessine sur des carnets de 40 centimètres et plus afin de représenter l’entièreté du paysage sur la feuille.
Pendant quatre ans, tu es parti t’installer à Pékin, en Chine. Pourquoi ce choix ?
La vie m’a fait un cadeau magnifique, j’ai rencontré une dame chinoise qui est devenue ma femme. Alors que la Chine était le dernier pays au monde où j’avais envie d’aller, j’ai découvert ce pays. À ma grande stupeur, j’ai aimé le peuple chinois alors que j’avais toutes les préventions et tous les préjugés défavorables à l’égard de la Chine.
Peux-tu nous partager un souvenir durant ce voyage ?
Avec mon épouse, nous avons visité les plus belles montagnes de Chine, Zhangjiajie, où ont été tournés les films Avatar. Pour atteindre les sommets, il faut monter 10 000 marches. En arrivant en haut du plus bel endroit du monde, nous avons été confrontés à une brume totale. Premier jour, nous sommes entourés d’une brume compacte. Deuxième jour, brume encore plus compacte. Le même schéma se répète pour le troisième jour. Le quatrième jour, nous avons décidé de redescendre. Mais en ouvrant le store, c’est l’émerveillement. Comme s’il avait fallu passer par cette phase de gommage et d’effacement total pour mériter cet éblouissement fabuleux.
Quelles sont tes prochaines destinations de voyage ?
La Chine, le Portugal et le Cambodge me manquent. En vérité, je n’ai pas envie de découvrir de nouveaux pays durant le temps de vie qu’il me reste. J’aimerais retourner en Chine et en Inde. Cependant, pour être concret et immédiat, j’ai envie d’explorer la Bretagne et de faire un voyage intérieur dans mon pays natal.
Retrouvez le carnet de voyage “Gloire et déboires au pays de Confucius” de Simon dans la revue Numéro 53