Roland & Sabrina Michaud
Roland & Sabrina Michaud ont découvert l’Afghanistan en 1964, étape enchanteresse sur la route d’un voyage de quatre ans et demi en voiture à travers l’Asie. À l’époque, le pays est une zone blanche sur la carte du monde.
« On n’en savait rien. C’était le mystère. Il n’y avait pas de photos, on ne savait pas à quoi ça ressemblait. Et là c’est le coup de foudre. On voit des montagnes qui ne sont pas tout à fait comme les nôtres, des sites extraordinaires, une harmonie incroyable entre les hommes et la nature qui les entoure et des coutumes qui n’étaient pas conservées dans les pays voisins parce qu’il y avait eu les progrès du monde moderne. L’Afghanistan restait enfermé dans ses montagnes, où les gens avaient gardé leurs traditions, leur allure, leur noblesse. » C’est au cours de ce premier voyage qu’ils entendent parler pour la première fois des caravanes d’hiver sur les rivières gelées, dans le corridor du Wakhan. « Il y avait cette langue de terre qui nous intriguait, où il y avait des chameaux à deux bosses, et on n’en savait pas grand-chose. Aujourd’hui, si vous relisez attentivement Marco Polo (Le Livre des merveilles, ndlr), qui a fait rêver l’Europe et l’Occident pendant des siècles, la partie la plus vivante et la plus intéressante du récit, c’est la partie du Wakhan, cette partie du Pamir », raconte Roland Michaud.
« Nos photos d’Afghanistan, c’est un peu aujourd’hui la mémoire de ce pays »
De ce premier voyage, ils ramènent 900 Kodachrome, 34 000 diapositives qu’ils découvriront à leur retour. « J’envoyais nos pellicules par petits paquets au fur et à mesure de nos possibilités. Dans les grandes villes, on rencontrait des experts, des profs, des médecins qui rentraient en France et on leur demandait s’ils pouvaient nous prendre un petit paquet. On n’envoyait jamais plus de cinq ou six pellicules. » Il leur faut attendre une éternité avant de pouvoir découvrir le résultat. Pendant trois mois au cours de l’été 1968, ils s’isolent à la campagne pour regarder tout ce travail. « Nous avons eu de bonnes surprises, nous avons eu de mauvaises surprises. On passe des moments d’exaltation car on a certaines bonnes photos, et puis des moments de tristesse parce que sur certaines photos, on s’est complètement loupé. »
Une seule solution s’impose alors aux yeux des photographes. Pendant quatorze ans, jusqu’en 1978, ils retournent en Afghanistan, pour approfondir leur travail, refaire les photos « ratées », retrouver les belles lumières… « Nous sommes des perfectionnistes. C’est notre œil qui nous guide, qui nous dit les photos qu’il faut qu’on fasse ». Ils constituent ainsi un fonds photographique d’une richesse inestimable. « Nos photos d’Afghanistan, c’est un peu aujourd’hui la mémoire de ce pays, parce qu’il y a eu depuis des changements draconiens avec les talibans. »
Le portrait de Roland & Sabrina Michaud à lire dans Numéro 42